L’élaboration du vin
Damien Courbet et la reprise d'un terroir à Château-Chalon
La fermentation alcoolique, un peu de chimie
Sous l'action miraculeuse de micro organismes (des familles bien précises de champignons monocellulaires) autrement appelés levures (oui oui les mêmes qui font lever le pain !) le jus de raisin (moût) se transforme en vin par un processus complexe dont la glycolyse tient la partie la plus importante. Les sucres dits "fermentescibles", essentiellement le glucose et le fructose contenus dans les fruits sont finalement transformés en alcool grâce à une réaction chimique puissante qui dégage un volume de gaz carbonique (CO₂) considérable (environ 40 fois le volume du liquide fermenté) ! Ce danger d'asphyxie dans des locaux mal ventilés où se déroulent ces fermentations explique malheureusement de nombreux accidents chaque année.
Il y a de multiples paramètres qui influent sur la fermentation alcoolique, notamment l'apport d'oxygène, la température, l'acidité des moûts, la pression. L'oxygène favorise la multiplication de levures (on parle de milieu aérobiose), le manque d'oxygène les fait au contraire ralentir dans leur travail (milieu anaérobiose). La qualité des levures est un paramètre clé, sachant certaines sont indésirables et propres au contraire à conduire à des déviances aromatiques, voire à des accidents de fermentation. La température conditionne le travail des levures, elles sont inactives au froid et leur activité s'accélère dès lors que la température augmente. Dès lors, dès que la réaction de fermentation s'emballe, c'est un paramètre très surveillé. Certaines propriétés n'hésitent pas à vinifier en cuves thermo-régulées pour mieux contrôler cette dernière et éviter un arrêt de fermentation.
N'étant pas biochimiste, ni oenologue de formation, je n'ai pas d'expertise à proposer en matière de fermentation, mais je crois en revanche au bienfait des levures dites "indigènes", celles que l'on trouve sur la pellicule des raisins, dans les barriques et dans l'atmosphère des chais. Un sulfitage excessif, des épandages répétés de pesticides, des pratiques productivistes tendent à endommager, voire à éradiquer ces populations de levures saines qui sont propres à faire fermenter des moûts sans intervention externe. Je suis méfiant quant aux fermentations qui sont activées par des levures exogènes, rajoutées si vous préférez, à partir de sachets de levures toutes prêtes achetées dans le commerce, versés dans les cuves et qui peuvent avoir une influence réelle sur le goût final du vin. La quasi totalité des vins que vous trouverez sur Vignalis sont vinifiés en levures indigènes, l'exception confirmant la règle. C'est pour moi un critère significatif de qualité, et cela en dit long sur la façon dont le raisin a été traité (ou non !) lors de son cycle végétatif.
La fermentation malolactique ou seconde fermentation
Beaucoup moins connue que sa grande soeur dont nous avons parlé juste avant (la fermentation alcoolique), la fermentation malolactique (ou FML comme on l'appelle dans le milieu) est la transformation, toujours sous l'action levurienne, de l'acide malique (qui est celui de l'arôme de la pomme) en acide lactique (responsable d'une texture plus grasse des vins). Longtemps restée sous les radars car beaucoup moins spectaculaire, cette seconde fermentation est aujourd'hui plus un sujet sur les vins blancs. Si elle n'a pas eu lieu dans la phase d'élevage ou pré-embouteillage, elle a des chances de se faire lorsque le vin est déjà en bouteilles, et des modifications substantielles peuvent se produire sur la qualité du vin (présence de gaz carbonique notamment, ou d'acide acétique). De ce fait, un vin embouteillé rapidement n'aura pas toujours fait sa "malo" et sa fraîcheur risque d'être altérée plus tard si elle se fait ultérieurement. En revanche, les vins élevés longuement sur lies et soutirés au printemps qui suit la vendange, font en général leur FML en quelques jours. La stabilité sera donc obtenue avant la mise en bouteilles.